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  • Photo du rédacteurSagesses Bouddhistes

L'intention d'une peinture

Rencontre avec David Rycroft


©Philippe Judenne

David Rycroft rencontre les enseignements boudd­histes en 1994 alors qu’il est déjà peintre. Après une année d’artiste en résidence, le jeune artiste rejoint son épouse en mission à Genève où il commence à peindre ses premières scènes de rue. En 1994, il suit de nouveau sa femme Vinciane à Paris. Les époux emménagent dans le 7earrondissement, à deux pas de la tour Eiffel et du Champ-de-Mars. C’est là que le peintre s’installe pendant quelque temps pour exécu­ter deux tableaux de grandes dimensions. Le hasard, dirons-nous, fait que le maître Sogyal Rinpoché en­seignait chaque semaine à la salle Adyar, tout près de la pelouse où le peintre avait posé son chevalet et du studio où les époux habitaient. Le hasard, encore, fit que David et Vinciane poussèrent un soir la porte du théâtre, rencontrèrent les enseignements et Sogyal Rinpoché, qui devinrent des sources d’inspiration in­défectibles et continues jusqu’à aujourd’hui.


Cambridge

Pour ce peintre engagé dans la voie bouddhiste, le tableau fini et le processus qui va aboutir à ce tableau doivent être en accord : « Si j’arrive à créer quelque chose qui est spacieux, lumineux, joyeux avec un peu de cœur dedans, c’est très bien. Et si j’arrive à le faire dans un état spacieux, détendu, alerte et dans l’ou­verture du cœur, c’est encore mieux ! C’est le but en fait, que le processus soit en accord avec le tableau fini », souligne David Rycroft.

Beaucoup de conditions sont à réunir pour que l’ac­cord se manifeste : organisation, patience, ténacité et l’intention de créer quelque chose qui inspire.

Le peintre commence par un travail technique sur les perspectives qui aboutit à la structure et la compo­sition de la scène. Il utilise par exemple des photos et des collages qui couvrent la scène panoramique à 180°, pour la condenser ensuite dans le tableau. L’artiste se réfère souvent à Poussin et Cézanne, les grands peintres français de paysage.


« Mettre la vie dans un tableau, c’est être devant le sujet et oser aller plus loin que dans l’atelier. On est là avec le sujet, on travaille intuitivement. »

David peint La Rochelle


« Ce n’est que lorsque je suis devant le sujet dans la rue, que je peux me connecter avec l’atmosphère de l’endroit pour mettre la vie dans le tableau », explique David qui a réalisé le tableau de la place Canourge à Montpellier en une cinquantaine d’heures. « Mettre la vie dans un tableau, c’est être devant le sujet et oser aller plus loin que dans l’atelier. On est là avec le sujet, on travaille intuitivement », explique-t-il.

Le travail dans la rue est tout à fait particulier avec ses bruits ambiants, la circulation des piétons, la météo et les imprévus de toute sorte. On est loin du calme d’un atelier. C’est l’occasion pour l’artiste de mettre en œuvre la pratique bouddhiste dans l’exé­cution de sa peinture. « Ce que j’essaye de cultiver dans la journée de peinture sont les qualités de dé­tente, de stabilité et d’attention. Les enseignements sur samatha, le calme mental, m’apportent beau­coup. Je sens que je peux utiliser vraiment l’activité de peindre, une activité somme toute assez simple (un lieu, une toile, une activité manuelle) comme sup­port de pratique où je cultive la détente, la stabilité et l’ouverture. C’est pour moi utiliser ça comme un exercice d’intégration : après une méditation assise de 35 min le matin par exemple, l’idée est de conti­nuer cela en action, en l’occurrence dans l’action de peindre. On réfléchit beaucoup quand on fait un ta­bleau mais le mieux est de lâcher, et de peindre in­tuitivement. On a l’intention de créer quelque chose et l’idée est de garder cette vision et juste d’être là », explique David Rycroft.

« Et si j’arrive à m’inspirer pendant la réalisation de la toile, c’est ce qui marche le mieux, c’est comme une communication transparente. Ce que j’adore dans la peinture, c’est créer l’espace mais un espace qui n’est pas vide, mais qui est plein, plein de couleur, de vibration et de vie : c’est l’inséparabilité de l’es­pace et de la vie dans l’espace, je ne sais pas si c’est vraiment bouddhiste mais c’est ça que j’essaye de communiquer. »


Aiguillerie - Huile sur toile, 150 X 90 cm « J’aime cette idée que l’on peut avoir des endroits du tableau plus ou moins détaillés. Cela fait un ensemble qui est plus harmonieux qu’une toile complétement et uniformément travaillée. La confiance en notre capacité pour la technique joue un rôle mais c’est aussi difficile de ne pas tomber dans le contrôle un peu rigide : on sait comment créer un tableau qui est bien composé, pour cela il y a des règles mais l’idée est pour moi est de faire la combinaison entre la composition, les règles, la technique et la surprise, l’accident, l’imprévu qui peut arriver, c’est la touche vivante, c’est peindre. »


 

Right Here, right Now – Huile sur toile, technique sans pinceau. « C’est toujours une expérimentation. Dans certains tableaux, j’essaye d’approcher des aspects éphémères et l’aspect de rêves. Tout le monde a cette créativité à explorer. Je ne me vois pas comme un artiste, je suis comme tous les autres. Il s’agit juste d’avoir confiance en sa capacité de créer et d’agir en choisissant une direction. Pour moi ça a été la peinture là où d’autre peuvent faire des films ou des sites web. »



Cet article est paru dans Sagesses Bouddhistes n°2 (Printemps 2017)


 




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